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OPINION
7 octobre 2020

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« Raciste », c’est ainsi qu’Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois, sera désigné après s’être catégoriquement opposé à la prise de mesure pour contrer le racisme systémique au Canada. Bien évidemment, si ce verdict est faux, il est difficile de comprendre pourquoi le chef bloquiste considérerait des mesures anti-discrimination comme étant à éviter. Malgré la complexité de la situation, c’est surtout la réaction démesurée des médias et du public québécois qui révèle une façade embarrassante de notre culture.

LA FIN DU MONDE
Jagmeet Singh aurait pu dire toutes les vulgarités du monde, il n’aurait jamais plus choqué les Québécois qu’en disant le terme « raciste ». Scandale. C’est ça, apparemment, la chose qui fait le plus peur à la majorité blanche québécoise. Le diagnostic fait si peur qu’on prend à peine le temps de s’attarder au « pourquo i» et au « comment ». Article après article, conférence après conférence, le refus de reconnaître l’existence du racisme et de la xénophobie au Québec devient si présent que ça en est inquiétant. Même si l’enjeu n’avait initialement aucune connexion avec le sentiment anti-québécois que l’on retrouve parfois au Canada, un bon nombre de journalistes et de politiciens de chez nous ont tout de même pris la décision de nous placer au centre de l’attention, détournant les regards du réel problème. Le voile se lève sur un visage laid.

Un article de Denise Bombardier portant sur la situation actuelle illustre parfaitement le phénomène de la fragilité québécoise. « Comment résister à ces attaques déstabilisantes qui font [des Québécois] des racistes systémiques du seul fait de la couleur de leur peau et de leurs batailles pour protéger leur langue, toujours bafouée, et leur culture distincte, qui inclut la laïcité ? » se demande la journaliste dans son article qui n’adresse nullement le problème de xénophobie et de racisme dans la province.

REGARDER LE PROBLÈME EN FACE
Pas de racisme systémique au Québec: voici le verdict de monsieur Legault. « Il n’y a pas un système en place qui fait qu’on s’organise pour discriminer », annonce-t-il dans une conférence en juin dernier. Ce que notre premier ministre évite de dire, c’est que le racisme et la discrimination systémique, ça ne saute pas tant aux yeux.

Non, il n’y a sûrement pas de comité spécialisé dans la nuisance aux minorités ethniques et religieuses au gouvernement du Québec. Pourtant, le service de police de Montréal a lui-même avoué avoir un problème de profilage racial touchant particulièrement les jeunes personnes noires. Pourtant, il y a trois ans, Radio-Canada affirmait que la discrimination raciale dans le secteur du logement était à la hausse. Pourtant, la loi 21 a contribué davantage à l’exclusion de minorités religieuses visibles dans le marché du travail québécois. La liste de preuves indiquant que la xénophobie est incrustée dans notre système est longue, sans compter la quantité incalculable de microagressions, d’actes haineux, etc.

LE PARADIS
Le problème, c’est que la fierté québécoise est dans nos jambes. La conversation sur la discrimination au Québec ne pourra jamais réellement commencer si la majorité francophone blanche continue à percevoir notre province comme un paradis immaculé où chaque critique est une attaque envers une culture si parfaite. Certes, la fragilité québécoise n’est pas apparue de nulle part; on se relève tout juste de la grande noirceur, de l’aliénation, encore un peu boiteux et titubant. C’est important de connaître notre histoire pour voir que la fierté brandie par plusieurs Québécois « de souche » n’a rien de solide; pour certains, ce n’est qu’un mécanisme de défense contre un ennemi indéfini. De la fierté sans amour, sans compassion, sans introspection et sans désir d’amélioration, ça perd vite son sens. Les critiques ne tueront pas la culture ni la langue, elles ne chasseront ni le théâtre ni la musique. Dans le futur, question de pouvoir être fier de quelque chose qui mérite la fierté, ne changeons pas le sujet.

Les gros mots

Marianne Saillant-Sylvain

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