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ARTICLE - ARCHIVE

10 octobre

​À PROPOS DE L'INDÉPENDANCE

Dominique Gaulin

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Je lisais dernièrement une brochure très intéressante "2 ou 3" questions à propos de l'indépendance distribuée par le Parti Québécois, c'est court, ça se lit très bien, c'est intéressant, et on y trouve toutes les réponses aux questions qui nous font peur au sujet de l'indépendance, à un tel point que j'ai cru bon de vous en faire connaître quelques-unes en écrivant cet article dans notre journal.

 

1. LE CANADA N'EST-IL PAS UN PAYS BILINGUE?

 

Le Canada est bilingue au Québec et unilingue dans les provinces anglaises. En dehors du Québec, les francophones représentent moins de 6% de la population. À Montréal, 35% des établissements ne fonctionnent qu'en anglais et 80% des postes de direction sont occupés par des anglophones. C'est pourquoi les immigrants cherchent à s'intégrer au milieu anglophone et choisissent l'école anglaise. Et le pourcentage de francophones diminue d'année en année. Il faut être aveugle pour ne pas voir que le bilinguisme au Canada, c'est ça que ça donne: l'anglicisation graduelle du Québec.

 

2. EST-IL VRAI QU'AU QUÉBEC, LES CANADIENS FRANÇAIS ONT DES SALAIRES PLUS BAS QUE LES ANGLOPHONES?

 

Oui, c'est vrai. Au Québec, le revenu du Québécois francophone est 40% plus bas que celui du Québécois d'origine britannique. En fait, dans tout le Canada, c'est au Québec que les Anglais sont les plus riches et les Français les plus pauvres. Le rapport de la fameuse commission Laurendeau Dunton révélait, il y a quelques années, que les anglophones unilingues du Québec gagnent en moyenne, par année, $3,000 de plus que les francophones unilingues et encore $ 1,500 de plus que les francophones bilingues.

 

Quand on pense que 80% des postes de commande des entreprises québécoises sont occupés par des anglophones unilingues, on s'étonne moins de ces faits. Au Québec, seuls les Italiens et les Indiens ont un revenu moyen plus bas que les francophones.

 

3. LE REVENU DES QUÉBÉCOIS EST-IL AUSSI ÉLEVÉ QUE CELUI DES ONTARIENS?

 

Non. En 1973, le revenu moyen des citoyens du Québec était de 3,839 $ alors que l'Ontarien avait, lui, 4,840 $ et l'écart va en augmentant. Quant à la moyenne canadienne, elle est de 4,254 $.

 

Par ailleurs, il y a toujours en moyenne deux fois plus de chômeurs au Québec qu'en Ontario.

 

Et, comme les politiques économiques du gouvernement fédéral visent d'abord à favoriser l'Ontario, cette situation, dans le régime actuel, n'est pas près de changer.

 

4. PEUT-ON ENCORE ESPÉRER UN STATUT PARTICULIER DANS LA CONFÉDÉRATION?

 

Non, c'est impossible. La réponse finale est d'ailleurs venue d'un Canadien français, Pierre-Elliott Trudeau, en 1968, quand il a dit: "pas question de statut particulier.”

 

Les autres provinces n'appuieront jamais non plus cette demande du Québec parce que, pour elles, une province est une administration régionale du gouvernement central d'Ottawa.

 

Donc, il ne nous reste qu'un choix: le fédéralisme centralisateur, où le Québec n'a qu'une voix sur 11, ou la souveraineté politique avec un seul gouvernement à Québec.

 

5. QU'EST-CE QUE ÇA VEUT DIRE L'INDÉPENDANCE?

 

L'indépendance, c'est le fait pour nous, Québécois, de devenir maîtres de nos affaires.

 

6. LE QUÉBEC PEUT-IL ÊTRE ÉCONOMIQUEMENT SOUVERAIN?

 

Aucun pays au monde, à l'heure présente, ne peut être économiquement souverain, en ce sens qu'aucun pays ne peut entièrement se suffire à lui-même. Cela est vrai des grands pays comme des petits. Nous vivons dans un monde économiquement interdépendant où les échanges entre pays sont essentiels. Un Québec politiquement souverain respectera naturellement cette exigence et ne se fermera certes pas sur lui-même, ce qui serait ridicule. Mais, contrairement à ce qui se passe actuellement, il aura les pouvoirs nécessaires pour orienter et contrôler son développement économique et pourra prendre des décisions sur l’établissement de relations économiques avec ses voisins et d’autres pays.

 

7. LES COMPAGNIES ONT-ELLES PEUR QUE LA LANGUE DE TRAVAIL SOIT LE FRANÇAIS?

 

Dans tous les pays indépendants, la langue officielle et la langue de travail, c'est la langue de la majorité. En France, on travaille le en français, au Mexique, en espagnol, en Suède, en suédois, au Danemark, en danois. Et personne ne s'en étonne puisque c'est normal. Toutes les compagnies étrangères s'y conforment sans dire un mot. Tout ce qu'il faut c'est que la situation soit claire et nette en partant.

 

8. LE QUÉBEC N'EST-IL PAS UN PETIT PAYS, SURTOUT À CÔTÉ DE VOISINS COMME LES ÉTATS-UNIS ET LE CANADA?

 

Nous habitons un territoire 2 fois et demiE plus grand que la France et 5 fois et demiE plus grand que la Grande-Bretagne. Il pourrait contenir à la fois l'Espagne, le Portugal, la France, la Belgique et les deux Allemagnes.

 

Et, parmi les 133 États membres des Nations-Unies, 72 sont moins peuplés que le Québec et plus de 100 ont des économies qui produisent moins que celle du Québec d'aujourd'hui.

 

Plusieurs pays qui ont une population égale ou inférieure à celle du Québec possèdent actuellement un niveau de vie plus élevé que celui du Québec francophone: par exemple, la Suède, le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Suisse la Belgique, la Hollande et bien d'autres encore.

 

La Suède, notamment, à un niveau de vie supérieur à celui du Canada, avec une population à peu près égale à celle du Québec. Or, la Suède est à proximité de deux pays géants sur le plan économique et quant à la population: la Russie et l'Allemagne. Qu'est-ce qui nous empêche de faire aussi bien?

 

9. QU'EST-CE QU'ON VA FAIRE DES BUREAUX DE POSTE, DES AÉROPORTS, DES CHEMINS DE FER, ETC. CELA APPARTIENT-IL AU FÉDÉRAL?

 

Le Québec deviendra propriétaire de tous les biens qui sont actuellement entre les mains de l'État fédéral et qui sont situés sur le territoire québécois. C'est là une règle de droit international reconnue par tous, règle par ailleurs très équitable: en effet, c'est avec l'argent des contribuables Québec que l'État fédéral a acquis les biens qu'il possède sur notre territoire; il est donc juste qu'au moment de l'indépendance, la propriété de ces biens revient à l'État québécois. C'est à cette condition d'ailleurs que le Québec assumera sa part de la dette fédérale, c'est-à-dire le passif correspondant à l'actif.

 

10 a) CERTAINS DISENT QUE L'INDÉPENDANCE FERA FUIR LES CAPITAUX ÉTRANGERS, QUE LES COMPAGNIES VONT S'EN ALLER? EST-CE VRAI?

 

C'est faux. Les investisseurs américains continuent d'investir au Moyen-Orient; ce n'est donc pas une souveraineté québécoise démocratiquement acquise qui va les inquiéter.

 

Alors qu'au Québec, tout naturellement, on considère que ce qui nous arrive est d'une importance et d'un spectaculaire inouïs, la grande entreprise internationale, elle, en a vu bien d'autres. Elle a connu et s'accommode encore de tous les régimes. La preuve, c'est qu'on boit du PEPSI en URSS.

 

10 b) Tant qu'il y aura des avantages pécuniaires à investir au Québec, les capitaux seront disponibles. D'ailleurs, pensons-y bien: pourquoi Coke s'en irait-il? Pour donner son marché à l'INCOLA?

 

En fait, rien n'est plus dommageable que l'actuel climat d'incertitude. Un État souverain stable est certes de nature à inspirer plus de confiance que l'actuelle Confédération canadienne sans cesse ébranlée par des partenaires en perpétuelle opposition.

 

11. SI LE QUÉBEC AVAIT SON DOLLAR, QUE VAUDRAIT-IL?

 

À la suite de l'élection d'un gouvernement du Parti Québécois, nous utiliserons encore, au moins pour un temps, le dollar canadien. Puis, une fois la souveraineté acquise, il se peut très bien qu'en accord avec le Canada, nous conservions ce même dollar canadien. Dans le cas contraire, le Québec aura son propre dollar.

 

Et le dollar québécois va "flotter" comme "flotte" le dollar canadien par rapport au dollar américain. Quand le Québec, par exemple, vendra beaucoup à l'étranger, recevra beaucoup de touristes, le dollar québécois "flottera" vers le haut. Dans les circonstances inverses, il "flottera" vers le bas. Et les périodes de hausse et de baisse vont sûrement alterner.. Comme c'est le cas depuis 20 ans pour le dollar canadien.

 

12. EST-IL POSSIBLE QU'UN GOUVERNEMENT DU PARTI QUÉBÉCOIS DÉCLARE L'INDÉPENDANCE DU QUÉBEC SOUDAINEMENT ET TOUT SEUL, SANS CONSULTER LA POPULATION À CE SUJET?

 

Non, cela est tout à fait exclu. Le Parti Québécois considère qu'après son élection, deux situations peuvent survenir. Ou bien le  transfert de pouvoirs et de ressources d'Ottawa vers le Québec se réalise selon un échéancier établi conjointement avec Ottawa; dans ce cas, l'accession à l'indépendance n'est ni soudaine ni unilatérale... Ou bien Ottawa fait obstacle à ce transfert. Dans ce cas, le gouvernement du Québec rend compte à la population québécoise de l'état des discussions et lui demande, à la lumière des discussions et lui demande, à la lumière des faits, de décider par référendum si elle veut ou non poursuivre l'accession à la souveraineté. Dans un tel cas, ce seront donc les citoyens qui décident librement de la marche à suivre, pas le gouvernement seul ni soudainement, ni unilatéralement. Ce recours à la consultation populaire découle d'un des principes de base du Parti Québécois : il veut réaliser la souveraineté du Québec avec la participation des citoyens, jamais malgré eux. 

 

13. QU'EST-CE QU'ON VA FAIRE AVI LES EMPLOYÉS DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL? POURRONT-ILS TRAVAILLER AU QUÉBEC?

 

Oui. Le Parti Québécois a pris des engagements clairs vis-à-vis des employés fédéraux. Il va donc intégrer à la Fonction publique québécoise les fonctionnaires et employés fédéraux résidant au Québec qui en exprimeront le désir, de manière à ce qu'ils n'aient 3 subir aucun préjudice financier.

 

a) L'échelle de leur traitement et salaire ne sera pas modifiée;

b) le transfert au Québec de leur fonds de pension et de retrait ainsi que des contributions de leur employeur sera négocié avec le gouvernement du Canada en élargissant la portée de l'accord existant;

c) tous les avantages sociaux acquis seront maintenus;

d) une indemnité de déménagement sera accordée, le cas échéant; 

e) les droits des retraités seront maintenus intégralement.

 

Je vous ai présenté 13 questions, il en reste 32 autant sinon plus intéressantes que je vous invite à lire, ça en vaut la peine.

 

P.S. Vous pourrez vous procurer "2 ou 3 choses à propos de l'indépendance" gratuitement au B.A.I.P (Bureau d'Action et d'information politique) au G-112 (grand dégagement)

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Dominique Gaulin

L'ÉCLOSION, Vol. 4 no 18, semaine du 1er au 5 mars 1976

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Image :
Jeremy Bezanger https://unsplash.com/@jeremybezanger

https://unsplash.com/photos/wNAbk7g24dU

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Transcription par Thomas Arteau

Mise en page par Amélie Bédard
 

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